DISCOURS – SPEECHS
ALEAS
DU GOUVERNEMENT D’ENTREPRISE
DEVELOPPEMENT
INSTITUTE INTERNATIONAL
CANNES
12EME CONFERENCE ANNUELLE, 15 &16 JUIN 2000
Organisée par le Centre Européen pour la Participation Salariale
«EVOLUTION DU
CADRE LEGAL ET FISCAL DES PLANS D’EPARGNE SALARIALE DANS LES ENTREPRISES
FRANÇAISES»
Par
Jean-Aymon. MASSIE Président d’AVAS et de l’AEAS
Mesdames, Messieurs,
Je
remercie tout particulièrement Malcolm Hurlston de la réussite de la 12ème Rencontre
Internationale, la 2ème cette année, à laquelle nous participons au titre de
l’Association Européenne des Actionnaires Salariés.
Je
remercie également Fred Hackworth et l’équipe d’organisation du Centre Européen
pour la Participation Salariale. Mes collègues vont vous présenter des
expériences françaises concrètes. A la demande du Centre Européen, je vais vous
décrire le cadre légal et fiscal qui au cours de ces 40 dernières années a
favorisé le développement de l’épargne salariale en France; il a évolué, et
aujourd’hui, il va s’adapter aux nouvelles exigences qui vont changer les
orientations des plans d’épargne d’entreprise.
Je
m’exprimerai en tant qu Président de l’Association AVAS du Groupe TotalFinaElf
et au nom de l’Association Européenne ; je n’ai ni la prétention, ni
l’autorisation de parler au nom du 4ème Groupe pétrolier mondial, ni d’Elf
Aquitaine où j’ai fait ma carrière durant 33 ans. Le Directeur des Ressources
Humaines et de la Communication est le seul habilité à parler au nom des salariés
de l’entreprise.
La
mise en place des plans d’épargne salariale d’entreprise en France est le
résultat d’un long processus législatif qui a permis de mettre en place la
Participation et de constituer une épargne salariale, qui pour beaucoup de salariés
représente un impressionnant « bas de laine » pouvant atteindre 3 à 5 fois le
salaire annuel. Le plan d’épargne d’entreprise est considéré actuellement comme
le dernier « paradis fiscal » sur le territoire français.
L’Epargne
salariale, logée dans les plans d’épargne d’entreprise serait évaluée à fin
décembre 1999 à près de 330 GF (50 G Euro, 33 billion de £). Dans le Groupe
TotalFinaElf, elle représenterait 25 GF, détenus par 70% des 130 000 salariés
du Groupe.
J’analyserai le cadre légal et
fiscal des plans d’épargne salariale en France sous 3 aspects:
q 1ère partie: l’organisation des plans d’épargne salariale et de
l’Actionnariat
Salarié
q 2ème partie: le droit d’expression et le droit de vote des Actionnaires
Salariés
q 3ème partie: la représentation des Actionnaires Salariés au Conseil de
Surveillance ou au
Conseil d’Administration de l’Entreprise
1ERE PARTIE : L’ORGANISATION DES PLANS
D’EPARGNE SALARIALE
ET DE L’ACTIONNARIAT SALARIE
Le
concept français d’actionnariat salarié et le concept anglo-américain «Employee
Share Ownwership Plan (ESOP)» ont le même objectif:
développer la Participation
Salariale à la fois financière, mais aussi la Participation aux décisions et à l’élaboration de la
stratégie de l’entreprise.
Le
modèle français de Participation Salariale a été adopté il y a 40 ans à la
demande du Général de Gaulle, qui par la voie d’ordonnances a instauré un
«système contractuel d’association ou d’intéressement des travailleurs à leur
entreprise»
En
1986, Jacques Chirac et Edouard Balladur en définissant le cadre des 1ères
privatisations ont poursuivi dans cette voie;
ils ont donné un essor décisif à l’épargne salariale et par voie de
conséquence à l’actionnariat salarié.
Aujourd’hui,
le Gouvernement veut en améliorer l’organisation. L’Assemblée Nationale et le
Sénat se prononceront au 4ème trimestre 2000 sur une proposition de loi
permettant d’une part de simplifier les mécanismes de l’épargne salariale afin
de renforcer la cohésion sociale, la stabilité de l’actionnariat et de
favoriser l’adoption de ces mécanismes par les PME-PMI ; d’autre part, cette
loi devrait encourager la mise en place d’un plan d’épargne d’entreprise à long
terme (PEELT), que j’avais déjà évoqué lors de la conférence de Davos en
février 2000.
D’autres
pays européens en dehors de la Grande-Bretagne ont adopté le même objectif; il
sera adapté aux cultures nationales et aux réalités économiques et sociales. En
effet, le rapport PEPPER (I et II) œuvre dans ce sens, à sa vitesse mais
sûrement dans les pays de la zone EURO.
1. EVOLUTION DU
CADRE LEGAL ET FISCAL DEPUIS 1959
A. Les
ordonnances édictées dès 1959 par le Général de Gaulle ont défini le cadre de
l’organisation de la « Participation aux résultats »
Ce
cadre a été mis en œuvre en étroite collaboration avec les partenaires sociaux;
les organisations syndicales ont été très présentes dans cette 1ère étape qui va de 1959 à 1986.
q l’ordonnance
du 7 janvier 1959 « tendant à favoriser
l’association ou l’intéressement des
travailleurs à l’entreprise ». Elle a institué un système contractuel et
souple, de caractère facultatif et présentant pour la 1ère fois d’importantes
exonérations fiscales et sociales accordées aux entreprises.
q Les 2
ordonnances du 17 août 1967 relatives :
§
à la Participation des salariés aux fruits de l’expansion
des entreprises (N. 67.693)
§
aux plans d’épargne
d’entreprise (N. 67.694)
Ces
ordonnances instaurent un nouveau régime obligatoire pour toute entreprise
employant plus de 100 salariés. Elles décrètent que la Participation du
personnel aux résultats (partage du bénéfice net fiscal après rémunération
prioritaire
forfaitaire des capitaux propres) est un droit (droit commun) reconnu à chaque
salarié; elles définissent le mode de calcul d’une «réserve spéciale de
participation», et les conditions de
blocage de 5 ans des sommes
attribuées aux salariés afin d’encourager une épargne salariale consacrée au
financement des investissements de l’entreprise, en franchise d’impôt.
- la loi du 25 juillet 1994 rendra
obligatoire ce dispositif pour les entreprises de plus de 50 salariés.
q la loi du 27
décembre 1973 relative à « la
souscription ou acquisition des sociétés par leurs salariés » a complété ces
dispositions.
Ces
textes ont donné naissance à l’épargne salariale et lui ont permis de se
développer dans près de 18 000 entreprises employant plus de 5 000 000 de
salariés qui avaient début 1995 un accord de participation ; ces entreprises
ont versé en 1995 environ 18 GF à 3,2 millions de salariés (5 600 F en moyenne)
au titre de la Participation, et 10 GF à 2,2 millions de salariés (4 500 F) au
titre de l’Intéressement.
a.
La Participation des
salariés aux résultats de l’entreprise (cette prime annuelle permet de
redistribuer aux salariés une part des profits de l’entreprise)
b.
L’Intéressement,
prime annuelle comportant 2 volets:
-
une prime de résultat
assise sur le résultat global de la société
-
et une prime de
progrès assise sur des critères de performance des établissements et des
personnels
c.
Les versements volontaires des salariés par prélèvements sur salaires mensuels
ou annuels dans la limite de 25% du salaire annuel brut
d. L’abondement annuel versé par
l’employeur vient compléter les
versements précédents s’ils sont investis dans le FCP N.1 (actions de la
société)
Les
Plans d’Epargne d’Entreprise (PEE) sont généralement constitués de plusieurs
fonds communs de placement (FCP) destinés à recevoir les versements annuels des
salariés et à les faire fructifier pendant la période blocage obligatoire de 5
ans. La loi française prévoit une douzaine de cas de déblocage anticipé
(mariage, décès, divorce, démission, licenciement, retraite, création
d’entreprise, construction ou travaux résidence principale).
Ces
sommes (attribuées en conformité avec les articles L.441, 442 et 443 du code du
travail) sont exonérées de charges sociales salariales, de l’impôt sur le
revenu, de l’impôt sur les plus values et sur les dividendes; mais elles sont
assujetties aux prélèvements sociaux (CSG + CRDS + CNAF/CNATS # 10 % depuis
01/01/98) appliquées aux plus values
réalisées au moment du remboursement
des parts.
Je
n’insisterai pas sur la composition du PEE (slide n°1) et du nombre de
FCP; mes collègues d’Interépargne et
d’Alcatel vous en parleront.
Nous reconnaissons que cette «
Participation aux résultats » était considérée et reste encore considérée comme
un instrument de politique salariale dans la plupart des entreprises françaises.
B.
les lois et ordonnances de 1986 relatives au programme des privatisations ont
élargi le cadre en encourageant « la Participation au capital
».
Le
programme de privatisation des grandes entreprises françaises décidé en 1986
par Jacques Chirac et Edouard Balladur a donné un essor décisif à l’épargne
salariale et, par voie de conséquence à l’actionnariat salarié.
En
France, les salariés ont pu souscrire à 10 % du capital privatisé :
-
rabais de 10 %,
paiement échelonné sur 12 ou 18 mois sans intérêt
-
exonération fiscale
des plus-values assortie d’un blocage de 5 ans des actions souscrites dans un
plan d’épargne d’entreprise spécialement aménagé à cet effet (FCP privatisation
1, 2, 3…).
Grâce
à la
Participation au capital des principales entreprises françaises
privatisées dès octobre 1986 comme Elf, l’épargne salariale a été multipliée
d’un seul coup par 2 ou par 3. Le % du capital de leur entreprise détenu par
les salariés et les retraités a fait un bond spectaculaire, passant de 1 % à 5
% chez Elf, à 7 % ou 10 % dans les banques ou les entreprises industrielles de
taille plus modeste.
Le
PEE a été considérablement valorisé par cet apport (slide n° 2), et principalement le FCP n° 1 – actions de
l’entreprise qui sera alimenté :
-
par les souscriptions
d’actions lors de la privatisation de l’entreprise en une ou plusieurs étapes
-
par les dividendes
réinvestis en actions (FCP n° 1)
-
par l’attribution
d’actions gratuites au terme d’une période de blocage convenue
-
par des augmentations
de capital réservées aux salariés à raison
de 1 % du capital tous les 2 ans aux conditions de la privatisation
Dans cette seconde étape qui va
de 1986 à ce jour, une législation particulière a été votée:
q les lois du 2 juillet
et du 6 août 1986 relatives aux modalités d’application des privatisations.
q L’ordonnance
du 21 octobre 1986 relative à «l’Intéressement et à la Participation des
salariés aux résultats de l’entreprise, et à l’actionnariat des salariés»
Le
plan d’épargne d’entreprise devient le support privilégié de l’actionnariat des
salariés avec un renforcement net des
avantages fiscaux pour les salariés et pour l’entreprise. Pour la 1ère fois, le terme d’Actionnariat Salarié est
utilisé.
Cette ordonnance apporte une
refonte en seul texte des deux régimes (de
participation et d’intéressement de 1959) et organise le Plan d’Epargne
d’Entreprise créé par l’ordonnance de 1967, afin de répondre aux besoins des
entreprises en matière de flexibilité économique, de motivation du personnel et
de renforcement de leurs fonds propres.
Elle
permet notamment:
-
L’exonération d’impôt
sur le revenu sur les sommes (intéressement et participation) investies par le
salarié dans le PEE en actions de la société)
-
L’augmentation du
plafond de l’abondement (porté à 10 ou 15 000 F) si le salarié bénéficiaire
investit en actions de l’entreprise
-
de faire des
augmentations de capital réservées aux adhérents du plan PEE (FCP actions) avec
une décote maximale de 20% sur le prix de référence arrêté par le Conseil d’administration.
Ces
augmentations de capital réservées aux salariés (et aux retraités s’ils
sont restés investis dans le PEE) vont
permettre de poursuivre la progression de l’Actionnariat Salarié à la fin du
programme de privatisation.
Plusieurs
décrets en juillet et novembre 1987sont venus compléter ce dispositif.
q la loi du 7
novembre 1990 modifiant
l’ordonnance du 21 octobre 1990 a pour but de corriger les excès de
l’Intéressement favorisé au détriment de la Participation et d’éviter que le
mécanisme participatif ne se substitue à la rémunération proprement dite et à
la négociation salariale.
q La loi du 19
juillet 1993 de
privatisation de 21 grandes entreprises françaises (industrielles, banques,
assurances, dont ELF, BNP, Rhône Poulenc, Usinor Sacilor, AGF, UAP), la
création d’une action spécifique détenue par l’Etat ou «Golden Share».
q La loi du 27
juillet 1994 relative à «l’amélioration de la participation des salariés dans
l’entreprise», sur les
recommandations du Rapport du Ministre GODFRAIN.
Elle
ne reprend qu’une partie des propositions. Elle n’a qu’un caractère incitatif.
Elle a 3 parties: « a
participation institutionnelle» liant plus étroitement la participation aux
décisions à la participation au capital détenu par le personnel (nous y
reviendrons dans la seconde partie), le droit à la formation économique, le
droit de vote article 21, et le «compte épargne-temps».
q Enfin un texte
de loi du 23 décembre 1988 permet la
création de fonds communs de placement
destinés à recevoir les actions souscrites lors des privatisations, gérés par
un Conseil de Surveillance exerçant les droits de vote (art. 20) ou restituant
les droits de vote aux actionnaires salariés (art. 21).
Nous
reviendrons sur ce sujet dans la 2ème partie (droit d’expression – droit de
vote).
Le
Conseil de Surveillance est composé paritairement de représentants des
organisations syndicales élus par le personnel et des représentants de la
Direction Générale. Depuis la loi du 27/07/94, des représentants présentés par une
association d’actionnaires salariés indépendante des syndicats ont été élus par
les salariés et siègent au Conseil de
Surveillance du PEE et parfois au Conseil d’Administration de l’entreprise.
Cette
seconde étape, qui débute avec la 1ère tranche de
privatisations, se poursuit aujourd’hui avec les privatisations en cours
(Télécom, transport aérien, aéronautique civile et militaire, …) ou à l’étude
(gaz et électricité, transport ferroviaire) en France et en Europe.
Lorsque
la privatisation d’une entreprise est achevée, il ne reste qu’une solution pour
accroître le % du capital détenu par les salariés et compenser l’érosion
naturelle (sorties après la période de blocage de 5 ans) :
une
augmentation de capital réservée aux actionnaires salariés tous les deux ans, à
raison de 1 % du capital aux conditions identiques à celles de la privatisation
(rabais de 20 %, paiement échelonné sur
12 à 18 mois et parfois un abondement de 50 % du montant versé par le salarié et
plafonné). L’ordonnance du 21 octobre 1986, exposée ci-dessus, en a précisé les
modalités.
Un
autre moyen d’accroître le % du capital détenu par les salariés et atteindre
des objectifs de 5 ou 10 % suivant la taille des entreprises et le niveau de sa
capitalisation boursière est: l’attribution de « stock-options
pour tous ». Je laisse le soin à mon confrère Thierry de Loppinot de vous
en parler.
Nous regrettons que cette
«participation au capital » n’est pas engagé une 3ème
étape : la «participation aux décisions».
Le rapport GODFRAIN en faisait la
recommandation, mais la loi du 27 juillet 1994 dans son titre 1 «la participation institutionnelle » a
manqué d’audace. Le cadre légal de cette 3ème étape reste à définir.
2. PROJET DE LOI
EN COURS D’EXAMEN
Pour définir le cadre en vigueur
pour les prochaines années des plans d’épargne salariales et plans d’épargne
long terme en vue d’une retraite complémentaire.
C’est
une nouvelle étape qui s’ouvre dans l’évolution des plans d’épargne salariale,
et qui nécessite un cadre légal et
fiscal auquel le Gouvernement s’emploie.
Il
a semble t-il 3 objectifs :
a)
simplifier les
mécanismes qui alimente l’épargne salariale
b)
favoriser l’adoption
de ces mécanismes par les PME/PMI
c)
encourager la mise en
place d’un plan d’épargne d’entreprise à long terme en vue d’une retraite
complémentaire.
Les
propositions présentées au Gouvernement, au terme d’une année d’enquête et de
plusieurs rapports, dont les plus complets ont été établis par M. Balligand
député et M. de Foucauld inspecteur des finances, devraient répondre à ces
objectifs et répondre à une attente des salariés.
En
effet, les salariés seront amenés à épargner dans leur entreprise en vue de
préparer une retraite complémentaire ou sur-complémentaire dans une optique de
long terme : 10 à 20 ans et plus.
Ce sera un effort supplémentaire d’épargne de leur part et non pas la captation
de leur épargne salariale.
Les entreprises deviendront
demain un gigantesque colleteur d’épargne en concurrence avec les banques et
les compagnies d’assurance.
Le
PEE LT (slide n°3) contrairement au
PEE n’est pas composé majoritairement d’actions de l’entreprise. Pour des
raisons liées à la sécurité de l’épargne, il offre un large éventail
d’investissements diversifiés.
Il
serait alimenté par des versements volontaires de la part des salariés,
mensuels ou annuels selon leur choix, et prélevés sur salaire.
Un
abondement versé par l’employeur viendrait compléter ces versements des
salariés encore en activité.
Une
possibilité devrait être offerte bien entendu aux salariés désireux de réinvestir
leur épargne salariale rendue disponible après la période de blocage de 5 ans.
Dans tous les cas, il faut préserver la
liberté de choix des épargnants :
- au moment de
la constitution de leur épargne
-
au moment de la disposition de cette épargne
Toutefois,
si un Actionnaire Salarié souhaite réinvestir dans le PEE son épargne pour une
nouvelle période de 5 ans, un abondement spécifique devra être versé par
l’entreprise.
Dans
ce cas, ce salarié a choisi l’objectif de constituer une épargne sur une
période de court et moyen terme pour répondre à un besoin précis (achat d’un
bien immobilier, paiement des études des enfants, mariage ou loisirs).
Il
faut noter que près de 60% des salariés ou retraités conservent leur épargne
dans le PEE une fois la période de 5 ans révolue, car ils veulent garder d’une
part la disponibilité de cette épargne, et d’autres part ils comprennent que
l’investissement en valeurs de l’entreprise, à quelques exceptions près, est le
plus valorisant.
C’est
pour cette raison que les responsables de la gestion du PEE LT auront bien du
mal à répartir les actifs entre actions et obligations – SICAV dans le contexte
économique actuel.
Aux
Etats-Unis, les fonds de pension ont
inversé au cours de ces 5 dernières années le ratio actions/obligations qui est
passé de 40% actions/60% obligations à près de 70 % en actions.
Au
terme de la période de blocage dans le PEE LT, l’épargnant ou retraité doit
pouvoir choisir entre une sortie en rente ou une sortie en capital.
Le
Plan PEE LT commence seulement à être
étudié et mis en place par un petit nombre d’entreprises : Vivendi,
Rhône-Poulenc, Saint-Gobain et Total.
Aujourd’hui,
contrairement au PEE (participation aux résultats et participation au capital)
il n’existe malheureusement pas encore de texte qui légifère et précise le
domaine d’application du PEE LT, amorce d’un fonds de pension « à
la française » ; la fiscalité est encore floue.
Compte
tenu de l’importance des sommes qui seront collectées dans le PEE LT, une
attention particulière devra être apportée à la composition, aux compétences,
et aux responsabilités du conseil de surveillance qui sera mis en place.
Les
actionnaires salariés, représentés ou pas par une association, devront être
représentés dans ce conseil de surveillance.
Le
droit de vote attaché aux actions devra
être exercé car il est un élément important du contrôle de la bonne
gestion de l’entreprise dont ils sont actionnaires.
En
ce qui concerne les PME-PMI et les
sociétés non côtées, il faudra innover et créer des fonds d’épargne
diversifiés regroupant des entreprises par
secteur d’activité, c’est-à-dire des plans d’épargne interentreprises.
Au niveau européen, une recommandation du Conseil de l’Union Européenne datant
de juillet 1992 encourage le développement de plans d’épargne dans les entreprises ayant des filiales dans
d’autres pays européens. C’est notamment le cas d’ELF.
Ce dispositif PEE + PEE LT
pourrait présenter des avantages considérables pour l’entreprise comme pour ses
salariés actionnaires dans les contextes actuels de fusions-acquisitions et de
globalisation des marchés :
- constituer un dispositif d’autodéfense, une
arme anti-OPA (Offre Publique d’Achat) mis en place avec l’entrée massive dans
le capital des entreprises françaises des fonds de retraite anglo-saxons et
asiatiques
- d’attirer
de brillants collaborateurs, de valoriser les équipes d’innovateurs, de
commerciaux ou de techniciens
- renforcer la motivation des différentes catégories
du personnel stimuler l’initiative, la responsabilité et la performance
individuelle
- faciliter la mutation des mentalités rendue
nécessaire par le passage du secteur public au secteur privé et par la
compétition internationale.
- enfin,
de créer un élément fédérateur de tous les personnels des 200 filiales d’une
entreprise comme ELF, présente dans 80 pays, exerçant des métiers différents et
issus de cultures contrastées.
A ce stade ce dispositif
contribuera à métamorphoser les individus travaillant dans une entreprise.
Le
droit d’expression et le droit de vote à l’occasion des AG de l’entreprise sont
étroitement liés, et résultent de la formation d’un actionnariat salarié en
France au cours d’un long processus qui a pris 40 ans.
1 – Au cours de la 1ère
étape de ce processus qui va de
1959 à 1986: c’est «la
Participation aux résultats»:
Grâce
aux mécanismes de l’Intéressement, de la Participation et de l’abondement,
investis facultativement dans un PEE pour des raisons purement fiscales, la
«Participation aux résultats» a donné naissance progressivement à une modeste
détention du capital de l’entreprise par les salariés; lorsque ceux-ci avaient
choisi d’investir leur épargne en action de l’entreprise.
Alors,
l’expression des actionnaires salariés était pratiquement inexistante, et à
titre individuel seulement; car avant I986 il n’existait pas d’Association
d’Actionnaires Salariés. Les AG accueillaient à cette époque quelques
retraités, quelques rares cadres osant s’absenter pendant les heures de bureau
et disposant du droit de vote attaché à leurs actions au nominatif, enfin des
petits porteurs fortunés et souvent très avisés; environ 200 à 300 personnes.
Chez
Elf Aquitaine, la 1ère entreprise française où ces accords de
participation furent mis en place dès 1968, l’Actionnariat Salarié durant cette
période ne dépassait pas 1 % du capital.
2
– Au cours de la 2ème
étape va de 1986 à ce
jour: c’est «la Participation
au capital»
Comme
nous l’avons exposé dans la 1ère partie, cela a pris 14 ans. Ce fut décisif,
car les salariés ont acheté massivement ainsi que les retraités de ces
entreprises privatisées. Fin 1999, les salariés détenaient entre 2% et 8% du
capital, suivant la taille, le niveau de capitalisation boursière et les
effectifs retenus dans le périmètre de consolidation sociale de l’entreprise.
Chez
Elf, avant la fusion, les salariés détenaient 5 % du capital. Dans le cadre du
nouveau Groupe l’actionnariat salarié «pèse» 3 % d’un capital, qui s’élève à
723 millions d’actions (800 GF de
capitalisation boursière).
Aujourd’hui
l’actionnariat salarié est devenu une évidence et un enjeu pour les dirigeants
d’entreprise, pour les institutionnels, pour les politiques, pour les
syndicats, même si les salariés eux mêmes n’ont pas encore conscience de leur
pouvoir et de leurs droits.
Leur droit d’expression s’exprime de 2 façons:
v individuellement: depuis 1986 beaucoup de salariés ont fréquenté les AG munis
des droits de vote attachés à leurs actions au nominatif (nominatif
administré par une banque ou compte titres, PEA…); quelques rares actionnaires
salariés ont vaincu les multiples obstacles pour voter avec leurs titres «au
porteur», munis de l’attestation de blocage indispensable. D’autres
actionnaires salariés préfèrent voter par correspondance après avoir analysé
les projets de résolution. Certains envoient tout simplement leur pouvoir en
blanc au Président de la Compagnie.
Plus
qu’un droit d’expression, c’est un besoin d’information qui est revendiqué.
v Collectivement à travers deux personnes morales:
·
Soit le conseil de surveillance du FCPE
exerce les droits de vote à l’AG (c’est le Président du Conseil qui vote),
après conversion des parts en actions, et selon les modalités prévues par l’article 20 de la loi du
23/12/1988. Le Président du Conseil de Surveillance du FCPE, généralement un
syndicaliste, s’exprime très rarement en AG. Le vote est presque toujours dans
le sens du Président de l’entreprise.
·
Soit l’association d’actionnaires salariés et
retraités de l’entreprise collecte les pouvoirs et s’exprime en AG en
votant pour ou contre les résolutions. L’Association peut recevoir les pouvoirs
en blanc des actionnaires salariés, si ceux-ci peuvent exercer le droit de vote
attaché aux parts de FCPE (converties en actions) au titre de l’article 21 de
la loi du 23/12/1988. L’Association doit également être propriétaire d’une ou
plusieurs actions au nominatif pour pouvoir être inscrite sur les registres de
l’Assemblée, être mandataire et s’exprimer au nom des actionnaires salariés.
Elle votera les résolutions suivant les positions retenues
par son Bureau en concertation avec ses adhérents. C’est une expression
collective. Avant l’AG et après l’AG la position de l’Association doit être
connue des adhérents.
Dès 1986 une 1ère association a été créée en
France, AVAS dans le Groupe Elf; depuis elle est intervenue à chaque AG de
l’entreprise.
Elle
a servi de modèle aux associations qui ont été créées depuis 1987 chez Rhône
Poulenc, Saint-Gobain, Société Générale, BNP, Usinor, Air France, Crédit
Lyonnais, France Télécom…)
Dans
ce contexte, un droit d’expression a été revendiqué dès la création de ces
associations. Et ce droit d’expression lors des AG passe par l’exercice du
droit de vote.
L’exercice
du droit de vote dépend du régime adopté par le règlement du FCPE: article
20 ou article 21.
Car
la majorité des actions détenues par les salariés et les retraités de
l’entreprise sont logées dans le ou les FCP, qui composent le PEE.
C’est un véritable changement de
culture qui s’opère en ce
moment dans l’entreprise.
- le salarié qui exerce le droit de vote se sent actionnaire: il est informé, il reçoit le rapport annuel, il
s’intéresse à la marche de l’entreprise, à sa stratégie et à ses résultats
financiers
- le salarié qui n’exerce pas le droit de vote se considère
comme épargnant : il reçoit
uniquement le relevé trimestriel du gestionnaire de son épargne salariale, il suit les cours des parts des FCPE et
mesure sa plus-value. La plupart ne réalisent pas qu’ils sont actionnaires de
leur entreprise, malgré les déclarations du management.
Privés
du droit de vote, les plus avisés s’estiment lésés et considèrent avoir investi
dans des «certificats d’investissement». Ils protestent.
Depuis
peu la grogne commence. Certains
Actionnaires Salariés et retraités exigent d’exercer leur droit de vote sur les
parts de FCPE disponibles, tout en restant investis dans le PEE.
Autant
de problèmes juridiques à résoudre dans les mois à venir par les responsables
de l’actionnariat salarié, par les gestionnaires, par les associations et par
les syndicats.
Car les AG d’entreprise sont
devenues un « théâtre », où chaque actionnaire souhaite assister à la
pièce ou bien la jouer!
L’actionnariat salarié est devenu
aujourd’hui dans plusieurs entreprises le 1er actionnaire, après l’éclatement des noyaux durs remplacés par les
actionnaires institutionnels étrangers (Fonds de pension notamment). Les
actionnaires salariés via la personne morale
(l’Association Volontaire) qui a vocation à les représenter, peuvent exprimer
un vote réfléchi et indépendant sur les résolutions. Ils ont le pouvoir de
refuser d’approuver les comptes, une décision stratégique, une cession d’actif;
ils peuvent s’opposer au programme de rachat d’actions pour constituer un auto
contrôle, à la nomination d’un administrateur; les actionnaires salariés et
leur association ont le pouvoir de présenter
des projets de résolution ou des
amendements lors de l’AG annuelle, dans l’intérêt de l’entreprise. Ils ont
le pouvoir et le droit d’agir en AG comme un actionnaire responsable et
conscient de ses droits et obligations.
L’octroi
d’un statut et de moyens passe par la reconnaissance de ce droit d’expression
et de l’exercice du droit de vote en AG par
l’Association d’actionnaires salariés, personne morale dénommée ESOP par
les anglo-américains, ayant vocation à représenter les actionnaires salariés.
Au
nom des principes de «Gouvernement
d’Entreprises» (corporate governance principles) codifiés par l’OCDE, qui
recommande 1 action = 1 voix, le droit d’expression et le droit de vote de
l’actionnariat salarié sont en voie de reconnaissance par les actionnaires
institutionnels et les dirigeants d’entreprise.
Les
spécialistes du droit des sociétés, la COB, des parlementaires, les auteurs de
code de « bonne gestion d’entreprise » (comme le code AFG-ASFFI, le
rapport Viénot I et II…) encouragent, par leurs prises de position, cette
évolution, qui me paraît irréversible.
q La loi du 24
juillet 1966 sur les sociétés commerciales
(n° 66-537) devrait être «rénovée», ou plutôt actualisée, pour tenir compte des
modifications importantes vécues par les entreprises. Le rapport du sénateur
Marini déposé en 1996 proposait d’importantes mises à jour, notamment sur le
droit d’expression des actionnaires minoritaires, qui englobe les Actionnaires
Salariés.
Le
Garde des Sceaux avait étudié en 1998 une proposition de loi qui devait
incorporer dans l’un des articles le droit d’expression des actionnaires
salariés, définir le rôle de cet actionnariat salarié et inciter la mise en
œuvre de moyens pour les associations d’actionnaires salariés.
q La loi du
25/07/1994 (n° 94 640) sur «l’amélioration de la participation des
salariés dans l’entreprise» est parvenue à ajouter un article (93-1) de la
loi de 1966 sur les sociétés commerciales, qui définit les conditions de
représentation de l’actionnariat salarié au conseil d’administration de
l’entreprise. Nous y reviendrons dans la 3ème partie de notre exposé.
L’Association d’Actionnaires
Salariés et Anciens Salariés est une Association Volontaire sans but lucratif régie par la loi du 19 juillet 1901. Elle
est considérée comme une entité externe à l’entreprise. Ce qui a pour
conséquence : interdiction d’utiliser les panneaux d’affichage sur les
lieux de travail, interdiction de distribuer des documents d’information aux
actionnaires salariés, interdiction d’utiliser l’intra-net ; la mise à
disposition d’un bureau dans l’entreprise est une faveur pas une
obligation ; les collaborateurs
actifs de l’Association doivent prendre sur leur temps de repos les heures
consacrées à la gestion de
l’Association, car il n’existe pas de système de crédit d’heures tel que prévu
par le droit syndical.
L’activité
de l’Association d’actionnaires salariés s’inscrit en effet dans le droit des
sociétés, le droit commercial et le droit boursier. En aucun cas l’activité d’une
Association d’actionnaires salariés ne relève du droit du travail ni du droit
syndical.
C’est
pourquoi la définition du statut et du
rôle de l’Association ainsi que les moyens à mettre en œuvre pour assurer
son fonctionnement, résultera d’une rénovation du droit des
sociétés (la loi du 24/07/1966)
Il
conviendrait d’affirmer d’abord que l’Association
des actionnaires salariés est une
entité interne à l’entreprise. Ce caractère interne lui donnerait
automatiquement accès à un certain nombre de moyens en terme de communication,
d’accès à l’information et de fonctionnement.
Ensuite
pour préciser les contours de son statut
juridique, il faudrait :
a)
déterminer un seuil
de 0,25 % du capital détenu par les actionnaires salariés en vue de déposer en
AG une résolution ou un amendement, avec les conditions de blocage habituelles,
b)
reconnaître à
l’Association la capacité juridique d’ester
en justice, si ses statuts le prévoient,
c)
garantir l’indépendance et l’autonomie de
l’Association, l’indépendance et la
protection de ses dirigeants (généralement des collaborateurs actifs), la
liberté d’expression et la liberté de réunion de ses membres.
L’association Volontaire des
Actionnaires Salariés et Retraités est par nature indépendante; car elle regroupe et fédère des salariés de plusieurs
nationalités, de cultures et de métiers différents, qui se considèrent comme
copropriétaires et co-entrepreneurs de leur entreprise. C’est pourquoi leur
intérêt individuel et collectif se confond avec l’intérêt de l’entreprise.
Contrairement
aux organisations syndicales dans l’entreprise, qui doivent se conformer aux
intérêts et aux directives formulées par la Centrale Nationale ou la
Fédération, les orientations retenues par l’Association d’actionnaires salariés
sont prises dans l’intérêt de l’entreprise et par conséquent de ses membres.
A
partir de ces constatations et de ces principes d’éthique, la définition du
statut de l’Association volontaire des
actionnaires salariés et retraités d’une entreprise ne devrait pas poser de
problème au législateur.
Maintenant
nous allons préciser le rôle de
l’actionnariat salarié, et par conséquent celui de l’association qui a
vocation à le représenter. En prenant l’exemple du nouveau Groupe Total Fina
Elf, nous estimons que :
1)
L’Actionnariat Salarié
est un élément fédérateur de tous
les personnels des nombreuses filiales d’un Groupe présent dans plus de 80
pays, exerçant des métiers différents et issus de cultures contrastées.
2)
L’Actionnariat Salarié est
un élément accélérateur de la
cohésion du nouveau Groupe, de la mobilité des équipes, de l’adhésion de
l’ensemble des salariés au projet industriel inscrit dans une vision
stratégique long terme, qui a abouti à l’issue de la fusion, à la constitution du 4ème Groupe pétrolier
mondial.
3) L’Actionnariat
Salarié (dont les stock
options sont aussi une
composante) est un moyen apprécié et reconnu pour attirer des experts,
pour valoriser les équipes d’innovateurs, de commerciaux ou de techniciens,
pour renforcer la motivation des différentes catégories de personnel, pour simuler l’initiative, la
responsabilité et la performance individuelle.
4)
Enfin, un Actionnariat Salarié fort et structuré est en général une arme de dissuasion en cas d’agression
d’un prédateur, mais c’est aussi un atout pour l’entreprise dans sa
communication financière, et lors d’une négociation pouvant aboutir à une
fusion négociée. Cette arme ou cet
atout, selon les cas, sont aussi importants que le niveau de la capitalisation
boursière du nouveau Groupe.
3EME PARTIE
REPRESENTATION DANS LES CONSEILS D’ADMINSITRATION
REPARTITION DES ROLES ENTRE ASSOCIATIONS ET SYNDICATS
«Un poste au CA» est une revendication commune à tous les animateurs
d’associations d’actionnaires minoritaires et plus particulièrement d’actionnaires
salariés, ce qui est justifié.
Mais
il faut aussi admettre que la représentation dans le CA de l’entreprise des
salariés au titre de l’actionnariat salarié consacre 2 constats :
-
le taux élevé de
détention du capital par les actionnaires et retraités (5 % ou 3 % en actions,
6 ou 10 % en voix grâce au droit de vote double) le plus souvent,
l’actionnariat salarié est le 1er actionnaire de l’entreprise.
-
l’existence d’une
Association d’actionnaires salariés dans l’entreprise, dynamique, représentative,
dans laquelle la plupart des salariés s’identifient.
En
effet, si un salarié ou un jeune retraité de l’entreprise siégeait au CA sans
avoir le support d’une Association il serait un homme seul ; il aurait dans les faits «une voix consultative». Par contre le
représentant de l’actionnariat salarié au CA, qui a derrière lui une puissante
association d’actionnaires salariés,
peut rapidement remonter du «terrain»
une information non déformée par les prismes hiérarchiques ; il peut aussi
rapidement restituer aux opérationnels dans toutes les filiales une information
(non confidentielle) nécessaire à la motivation des personnels et à la bonne
marche de l’entreprise. Il est un homme bien informé, en prise directe avec les
réalités de l’entreprise; il a une capacité de mobilisation des salariés
actionnaires ou pas aux décisions stratégiques de l’entreprise, qui fait de lui
un administrateur écouté, exerçant
réellement sa «voix délibérative»
dans les réunions du C A. Je prétendrai qu’il a également la qualité « d’administrateur indépendant».
Mais c’est un autre sujet de discussion.
q L’article 93
de la loi de 1966 a été enrichi par des apports successifs récents:
-
la loi n° 94-126 du
11/02/1994
-
la loi n° 94-640 du
25/07/1994 (loi Giraud)
q L’article 93-1
(loi du 25/07/1994) précise clairement:
«Lorsque
le rapport présenté par le conseil d’administration lors de l’assemblée
générale en application de l’article 157-2 établit que les actions détenues par
le personnel de la société ainsi que par le personnel des sociétés qui lui sont
liées au sens de l’article 208-4 représentent plus de 5 % du capital social de la société, une assemblée générale
extraordinaire est convoquée pour se prononcer sur l’introduction dans les statuts d’une clause prévoyant qu’un ou deux administrateurs doivent être nommés
parmi les salariés actionnaires ou, le cas échéant, parmi les salariés
membres du conseil de surveillance d’un fonds commun de placement d’entreprise
détenant des actions de la société, soit en même temps que l’assemblée générale
ordinaire qui examine le rapport, soit au plus tard à l’occasion de la plus
prochaine assemblée générale ordinaire. Ces administrateurs sont nommés par
l'assemblée générale des actionnaires sur proposition des actionnaires visés à
l’article 157-2, dans des conditions fixées par décret ».
q Le décret
d’application 95-237du 2 mars1995, précise dans l’article 1er
«Lorsque,
en application des dispositions de l’article 93-1 de la loi du 24 juillet 1966
susvisée, les statuts prévoient qu’un ou deux administrateurs doivent être
nommés parmi les salariés actionnaires, ces mêmes statuts prévoient également,
selon les modalités suivantes, les conditions dans lesquelles sont désignés les
candidats à cette nomination:
1)
Lorsque le droit de
vote attaché aux actions détenues par les salariés est exercé par les membres
du conseil de surveillance d’un fonds commun de placement, les candidats sont
désignés par ce conseil.
2)Lorsque le droit de vote attaché aux
actions détenues par les salariés est
directement exercé par ceux-ci, les candidats sont désignés, à
l’occasion de la consultation prévue à l’article 161 de la loi du 24 juillet
1966 susvisée, soit par les salariés actionnaires spécialement réunis à cet
effet, soit dans le cadre d’une consultation écrite. Seules les candidatures présentées par un groupe d’actionnaires
représentant au moins 5 % de l’actionnariat salarié détenu directement sont
recevables.
Nous
rappelons que la représentation des salariés dans les CA (ou de surveillance)
des entreprises relevant du secteur public, définie par la loi n° 83.675 du 26/07/1983
(« sur la démocratisation du secteur public ») n’est plus
justifiée lorsque l’entreprise a été entièrement privatisée. C’est alors que la
loi du 25/07/1994 et l’article 93-1 prennent le relais pour assurer dans le CA
la présence d’un ou deux représentants des salariés au titre de l’actionnariat
salarié.
Même
s’il est ²incitatif
et facultatif ²
ce dernier texte de loi est novateur et courageux; il comporte d’ailleurs des
dispositions contraignantes pour les sociétés, comme:
·
le recensement chaque
année par la société des actionnaires salariés, à partir des actions détenues
dans les plans d’épargne d’entreprise ou les FCPE, assorties d’une période
d’incessibilité prévue par les textes (excluant les actions achetées
personnellement en dehors de ce cadre)
·
la modification des
statuts de la société devient nécessaire dès qu’est constaté, à la clôture du
dernier exercice, le franchissement du seuil de 5 % du capital social par l’actionnariat salarié ; l’AGE doit être convoquée ; si les
actionnaires rejetaient la modification proposée, une nouvelle AGE devrait être
convoqué dans un délai de 5 ans.
Voilà
pour l’essentiel.
Notre position est la suivante:
1)
le seuil de 5 % est
aujourd’hui trop élevé, car le capital de plusieurs entreprises importantes, où
l’actionnariat salarié est développé, ont vu croître leur capital social d’une
façon vertigineuse à la suite d’une fusion acquisition par OPE ou OPA.
Je propose d’abaisser ce seuil à 3 %, pour les entreprises
dont le capital social est > à 500 M d’actions et dont la capitalisation
boursière est élevée; soit à partir d’un barème dégressif.
Exemple Total Fina Elf : 5 % de 723 M d’actions
représente 36 M d’actions possédées par 100.000 salariés (sur 130 000).
Aujourd’hui
nous détenons 23 M d’actions, soit 3,2 % . Pour atteindre 5 %, objectif
réaliste, il faudra organiser tous les deux ans une augmentation de capital
réservée portant sur 1 % (7,2 M d’actions). Cela prendra au moins 6 ans pour
tenir compte de l’érosion naturelle et des sorties du PEE à l’échéance de 5
ans.
L’avant-projet de loi soumis à la
concertation sur l’épargne salariale propose un abaissement des seuils prévus
par la loi, d’une part en réduisant de 5 ans à 3 ans la fréquence de la
question posée à l’AG sur la modification des statuts et d’autre part, à 3% (et
non plus 5%) le pourcentage de capital détenu par les salariés.
2)
Quelque soit le mode
de désignation des candidats au CA soit par le conseil de surveillance du PEE,
soit par un groupe d’actionnaires salariés (regroupés dans une association),
l’élection au CA doit passer par l’AG. Tous les administrateurs (qui sont des
personnes physiques et non pas des personnes morales) doivent être élus par
l’ensemble des actionnaires réunis en AG; cette élection confère à
l’administrateur sa légitimité (voix délibérative)
3)
Etre présent au CA ne
suffit pas, il faut que le nouvel administrateur représentant l’actionnariat
salarié participe à un comité spécialisé (audit, rémunérations, nomination des
administrateurs, stratégie…) – car les travaux et les décisions du CA sont
préparés par ces comités. Leur rôle ira croissant sous la pression des Fonds de
pension anglo-américains et les recommandations de principe de «corporate
governance» -
Quelle répartition des rôles
entre organisations syndicales et associations d’actionnaires salariés ?
Reconnaissons
que les organisations syndicales et les Associations d’actionnaires salariés
ont le même objectif final: le développement durable de l’entreprise qui passe
par l’investissement et la création d’emplois qualifiés. Nous avons la même
vision sur le long terme mais les moyens et les objectifs intermédiaires sont
différents.
D’abord le droit qui régit ces
organisations est différent:
-l’activité
des organisations syndicales relève du droit du travail et du droit syndical
-le
champ d’activités des associations d’actionnaires salariés s’inscrit dans le
droit des sociétés et le droit boursier. Les actionnaires salariés d’un groupe
multinational appartenant à 20 nationalités différentes ne se reconnaissent pas
nécessairement dans des organisations syndicales européennes, les retraités
n’ont généralement pas conservé leurs liens avec une organisation syndicale;
mais tous se sentent fédérés par l’association d’actionnaires salariés.
A
l’occasion des fusions acquisitions actuelles, des problèmes nouveaux
surgissent:
-
les organisations
syndicales doivent défendre les pôles régionaux d’emploi, la réglementation du travail (application
des 35h), les rémunérations et arbitrer les conflits sociaux .
-
les associations
d’actionnaires salariés ont par contre un rôle important dans l’élaboration de
la stratégie et les politiques retenues par la Direction Générale de
l’entreprise, l’évaluation des moyens budgétés et lors de l’Assemblée Générale
le contrôle et le jugement des résultats.
Si les associations
d’actionnaires n’ont pas à intervenir sur des négociations en vue de la
résolution des conflits sociaux, elles doivent par contre rappeler à la DG les
principes de bonne gestion (corporate governance) et de comportement dans les
relations humaines au sein d’une entreprise socialement responsable qui
privilégie le développement durable.
En conclusion je suis convaincu que le développement de l’actionnariat
salarié sous ces différentes formes contribue au changement de culture dans
l’entreprise et à la transformation profonde des méthodes de management.
Une
métamorphose des salariés est en train de s’opérer: se sentant copropriétaires,
responsables, solidaires, les salariés seront alors plus motivés, plus enclins
à innover, à se dépasser dans la négociation commerciale, l’exécution ou la
direction d’un projet, le respect des termes du contrat imposés par un client;
les individus seront enfin disposés à se demander chaque matin: «que puis-je faire pour améliorer la
compétitivité de mon entreprise, faire progresser le cours de l’action et
valoriser mon épargne salariale?»
Enfin
grâce à la présence vigilante de l’Actionnariat Salarié, un contrepoids
nécessaire aux autres actionnaires institutionnels, nous pouvons espérer que
sera rétablie dans les entreprises la primauté du facteur humain sur le facteur
économique et financier.
Je
vous remercie de votre attention
Jean Aymon Massie
AVAS –
Association Volontaire des Actionnaires Salariés et anciens salariés du Groupe TotalFinaElf régie par la loi du 19
juillet 1901
Association
déclarée le 13 octobre 1986, modifiée le 17 novembre 1999
) AVAS, Tour Elf, Bureau 03E12, 92078 Paris la Défense Cedex, France
% 01 47.44.27.18 %01.74.44.29.32 u Fax. 01. 47.44.37.82 u
email: esop.avas@elf-p.fr