Monsieur
Thierry DESMAREST
Président Directeur Général du Groupe TotalFinaElf
Tour Coupole
92078 Paris La Défense.
Paris la Défense le 21 février 2002,
Monsieur le Président du Conseil d’Administration,
L’affaire Enron / Andersen, et celles qui très probablement éclateront dans les semaines à venir aux Etats Unis et en Europe, devraient lever les derniers obstacles au respect effectif et sincère des principes de gouvernement d’entreprise, proposés en France en juillet 1995 par le courageux rapport VIENOT*.
Elles pourraient également avoir pour conséquence logique une importante
modernisation du droit des sociétés, recommandée par le sénateur Philippe MARINI en juillet 1996 dans
son rapport au Premier Ministre**, et inéluctablement une
progressive modification de la gestion des entreprises, ainsi qu’un renforcement
du rôle et des responsabilités des membres de leur Conseil d’Administration.
C’est ce qu’attendent les Investisseurs Institutionnels et les actionnaires minoritaires. C’est également le souhait des Actionnaires Salariés et l’un des objectifs d’AVAS, qui œuvre dans ce sens avec ses modestes moyens depuis six ans***.
Il faut normalement s’attendre à ce que les acteurs et les partenaires de la régulation des marchés financiers, pris en défaut par ce scandale, tombent dans un autre extrême : la suspicion systématique et l’inquisition tapageuse, particulièrement à l’égard des grands groupes constitués récemment à l’occasion des fusions-acquisitions. Les points sensibles pourraient être : la structure et la localisation de la dette, les survaleurs, la gestion de la trésorerie et le contrôle des placements à risques, l’analyse des flux financiers entre les filiales et la maison mère et la localisation des structures off-shore, les mécanismes d’assurances et de facturation de ces prestations aux filiales….
Des organismes américains comme l’OFAC, semble-t-il, sont déterminés à pousser leurs investigations et peut-être à leur donner une publicité fâcheuse pour les groupes européens les plus compétitifs.
Lorsqu’en début d’année, j’ai sollicité un entretien avec vous, Monsieur Le Président, c’était pour vous entretenir avant l’AG de mai 2002, de ces questions que l’actualité entre temps a mis en valeur.
Dès leur publication, nous avons étudié les résultats préliminaires de l’année 2001, très schématiques il est vrai, mais qui permettent de prendre connaissance des grands équilibres et de la meilleure performance du Groupe par rapport à ses concurrents, notamment le bénéfice net par action maintenu au même niveau que l’année précédente (performance soutenue par un important programme de rachat et d’annulation d’actions).
Nous avons reçu des réponses satisfaisantes à nos question techniques sur les comptes. Mais nous restons soucieux du niveau d’exposition du Groupe sur les pays d’Asie Centrale et ceux d’Amérique Latine. Par ailleurs nous sommes particulièrement préoccupés par les relations du Groupe avec ENRON et les pertes éventuelles qui pourraient en découler par la suite, même si aujourd’hui le montant constaté paraît dérisoire. Nous nous inquiétons également de la place prépondérante prise par l’ex Arthur Andersen sous ses différentes facettes dans des grandes entreprises françaises comme le Groupe dirigé par Serge TCHURUK et celui que vous présidez : le rôle de commissaires aux comptes, la fonction de consultant en stratégie et en informatique, et l’outsourcing.
Depuis que la faillite d’ENRON, avec la complicité présumée d’Andersen, a
été rendue publique, nous pensons que très certainement ces questions ont été
largement débattues au sein du Conseil d’Administration du Groupe, et que son Comité d’Audit fera preuve d’une
vigilance particulière pour s’assurer de
l’efficacité des contrôles internes, de l’indépendance des Commissaires aux
Comptes et de la qualité de leur certification.
Nous ne doutons pas Monsieur le Président que vous apporterez lors de la prochaine AG, tous les éclaircissements nécessaires aux actionnaires et l’assurance que le développement durable de ce magnifique Groupe se poursuivra dans la transparence et la confiance.
Je vous prie de bien vouloir agréer, Monsieur le Président, l’expression de mon très profond respect et de mon fidèle dévouement.
Jean-Aymon MASSIE
Président d’AVAS.
* Rapport VIENOT « Le Conseil d’Administration des sociétés cotées », (juillet 1995).
** Rapport MARINI « La modernisation du Droit des sociétés », (juillet 1996).
*** Colloque au Sénat « les actionnaires salariés et le gouvernement de leur entreprise » organisé par AVAS et la FAS (mai 1996).
Comité d'Audit de
TotalFinaElf
A l'attention de : Monsieur
Jacques FRIEDMANN
Monsieur Bertrand JACQUILLAT
Monsieur Thierry de RUDDER
Paris la Défense le 27
février 2002,
Monsieur l'Administrateur,
Vous êtes membre du Comité
d'Audit de TotalFinaElf, avec pour mission de donner au Conseil
d'Administration un avis sur la qualité des comptes et l'état du contrôle
interne du Groupe.
Vous êtes l'ultime contrôle
avant que le Conseil ne se prononce sur la validité des résultats annuels ou
sur les comptes semestriels. Vous êtes responsable de la transparence et de la
sincérité des comptes, et le garant de la qualité de la certification des
Commissaires aux Comptes.
Nous avons le plus grand
respect pour votre mission. C'est pourquoi aujourd'hui après l'affaire Enron /
Andersen, nous défendons l'indépendance et la responsabilité des Administrateurs
et tout particulièrement des membres du Comité d'Audit.
C'est non seulement un des
principes énumérés dans "l'OECD Principles of Corporate Governance" et par "l'AFG-ASFFI",
mais également le fondement de la confiance des actionnaires.
AVAS vous adresse une copie
de la lettre qu'elle vient d'écrire au Président du Conseil d'Administration,
Monsieur Thierry DESMAREST.
Nous vous prions de bien
vouloir agréer, Monsieur l'Administrateur, l'expression de notre très
respectueuse considération.
Jean-Aymon
MASSIE
Président
d'AVAS.
Copie à : Monsieur
Thierry DESMAREST ;
Monsieur Robert
CASTAIGNE.